Les banques en ligne peuvent-elles concurrencer durablement les banques traditionnelles ?

question banqueDepuis quelques années, les Français sont de plus en plus nombreux à se laisser tenter par les banques en ligne. Entre gratuité, instantanéité et souplesse, il faut dire qu’elles ont de quoi séduire. De leur côté, les banques traditionnelles ne cessent de fermer ou de fusionner davantage d’agences. À tel point qu’il devient légitime de s’interroger sérieusement sur l’avenir du paysage bancaire : est-ce la fin des banques classiques, au profit de l’avènement des banques en ligne ? Celles-ci ont-elles vraiment le potentiel de détrôner les banques classiques ?

Banques en ligne : décryptage d’un succès

3 millions de clients à l’orée 2017

À l’orée de l’année 2017, le chiffre est tombé : 3 millions de Français se seraient déjà laissés tenter par les banques en ligne, leurs comptes courants et leurs solutions d’épargne. Economie Matin, parmi d’autres, relaie par exemple la nouvelle. La répartition de cette clientèle n’est cependant pas homogène entre les différentes banques en ligne. Deux d’entre elles caracolent en tête depuis plusieurs années : ING Direct, qui a atteint le million de clients en 2015, et Boursorama Banque, qui a fait de même début 2017. Les autres organismes se disputent le reste des clients.

Multiplication des offres et des cibles

Autre symptôme du succès des banques en ligne, la multiplication impressionnante des organismes. Tout banque sans fraisle monde cherche à se positionner et à avoir sa part du gâteau, à croire qu’il s’agit d’une véritable ruée vers l’or. Rien qu’en 2017, au moins trois nouveaux services bancaires en ligne devraient voir le jour. Inutile de préciser que c’est énorme.

En tout, on compte donc une dizaine d’organismes s’étant placé sur ce créneau : ING Direct, Boursorama Banque, Fortuneo, Hello bank, BforBank, Monabanq, Orange Bank (lancement prévu le 6 juillet 2017), Anytime, C-zam ou encore le Compte Nickel. Tous cependant n’ont pas la même cible.

>> Lire aussi : la liste complète des banques en ligne

Il faut distinguer les banques en ligne selon deux critères :

  • La gratuité :
    • Les banques en ligne gratuites, dont ladite gratuité est soumise à un revenu mensuel minimum : ING Direct (1 200€), Boursorama (1 000€), Fortuneo (1 200€), Orange Bank (à priori, sans conditions), etc
    • les banques en ligne payantes, sans conditions de revenus : Monabanq (24€ par an), C-zam (12€), Anytime (27€) etc.  À noter qu’Anytime et C-zam acceptent également les interdits bancaires.
  • Les services :
    • Les banques en ligne proposant une offre bancaire quasi-complète (avec RIB, chéquier, carte bancaire nominative) : ING Direct, Boursorama Banque, Fortuneo, BforBank, Monabanq, etc
    • Celles proposant une orffre bancaire incomplète (pas de chéquier ou de carte bancaire nominative) : C-zam, Anytime, Compte Nickel

C-zam, la banque en ligne de Carrefour Banque, a été lancée en avril 2017. Lui fera suite en juillet Orange Bank, éditée par l’opérateur bien connu.

Force est aussi de remarquer que les conditions d’accès (revenus mensuels essentiellement) ont globalement baissé ces dernières années, afin d’atteindre une clientèle plus large. Seule ING Direct a fait le choix contraire : de 750€ mensuels minimum, elle est passée à 1200€ pour obtenir sa carte gold gratuite. Toutefois, une autre offre a parallèlement vu le jour, ceux qui ne bénéficient pas de ces revenus peuvent opter pour une version payante à 5€ par mois, soit 60€ par an, contre entre 130 et 140€ pour une carte gold dans les banques classiques.

► Retrouver notre classement des banques en ligne

Des tarifs très attractifs

Ce qui attire le client, c’est évidemment les prix sans commune mesure avec ceux des banques traditionnelles, ainsi que la souplesse des banques en ligne. 

En effet, l’absence d’agences physiques et des coûts conséquents permet aux banques en ligne de proposer de nombreux services gratuitement : carte bancaire, tenue de compte, retraits dans les distributeurs, absence de commission d’intervention, taux de découvert inférieurs à ceux des banques traditionnelles… les banques classiques ne peuvent rivaliser.

La guerre des primes

Pour attirer le chaland, rien de mieux que de les matraquer de publicité et d’offres promotionnelles. Ainsi, la plupart des banques en ligne offrent une prime de bienvenue d’un montant de 80€. Monabanq va même jusqu’à 120€, à raison de 10€ par mois pendant un an (voir l’offre). Peuvent s’y additionner un taux attractif de livret non réglementé pendant deux ou trois mois, ou encore une prime à l’ouverture d’une assurance-vie.

Un succès suffisant pour mettre en danger les banques classiques ?

Bien que l’essor des banques en ligne soit indubitable, est-il pour autant suffisant pour mettre en danger les banques classiques ? Avant de répondre à cette question, il est bon de préciser plusieurs points :

Les banques en ligne appartiennent aux banques traditionnelles

Il n’existe, aujourd’hui, aucune véritable banque en ligne qui soit totalement indépendante. Toutes ont fini un jour ou l’autre par être rachetées par une banque traditionnelle. Le dernier exemple en date est celui du Compte Nickel, qui a été acquis par la BNP Paribas. Celle-ci avait déjà lancé Hello bank.

banque en ligneIl faut tenir compte de la multi-bancarisation

Autrement dit, posséder plusieurs comptes dans plusieurs banques différentes. Cette pratique se propage de plus en plus afin de profiter des services et des avantages de deux banques (ou plus) distinctes. Ces comptes peuvent être détenus soit dans deux banques en ligne, dans deux banques classiques, ou dans une banque en ligne et une banque classique.

Les banques en ligne et les banques classiques sont en effet complémentaires. La banque en ligne apporte la gratuité, le taux de découvert faible, les retraits possibles dans tous les distributeurs sans frais, une deuxième carte bancaire (qui peut être pratique en cas de voyage notamment), ainsi que la simplicité et l’autonomie grâce aux applications et espaces clients très performants.

De même, la banque classique apporte l’agence bancaire, le conseiller (même si nous sommes de moins en moins nombreux à lui rendre visite, sauf quand on souhaite souscrire un crédit), et la possibilité de remettre un chèque, du liquide, d’aller chercher un chèque de banque… sans avoir à passer par la voie postale, ce qui est le cas dans les banques en ligne.

Sur les forums, on peut donc retrouver ce type de témoignages :

Je suis client chez ING, Boursorama et Fortuneo.
ING- Je l’utilise pour tout ce qui est virements/prélèvements, on peut gérer facilement les autorisations de prélèvements et les supprimer éventuellement, sans frais. Le taux du livret n’est pas intéressant.
Boursorama- Davantage de produits disponibles que chez les autres banques en ligne. Pas de plafonds pour les virements internet, votre argent est réellement disponible à tout moment.
Fortuneo- C’est la plus intéressante si vous cherchez une banque en ligne, car elle propose des services que les 2 autres n’ont pas. Par exemple la carte virtuelle pour les paiements sur internet (service gratuit). La possibilité d’alimenter son compte en débitant une carte qu’on a dans une autre banque (vous avez ce virement immédiatement, mais la carte n’est débitée qu’après)…

Mais après tout…. pourquoi vouloir choisir une seule banque parmi ces 3 ? Rien n’interdit d’ouvrir un compte dans chacune, cela ne coute rien et permet de se faire une idée soi-même, quitte à clôturer les comptes devenus inutiles par la suite

De fait, un nouveau client dans une banque en ligne ne signifie pas forcément un client de perdu pour une banque traditionnelle.

Le taux de la multi-bancarisation est cependant en recul : certains clients qui ne faisaient que tester les banques en ligne ferment désormais leur compte dans les banques classiques, satisfaits de l’offre des premières.

L’offre bancaire des banques en ligne est encore incomplète

Notamment en ce qui concerne le crédit. Cinq banques en ligne proposent le crédit immobilier (Boursorama Banque, Hello bank, ING Direct, BforBanl et Fortuneo), et trois le crédit à la consommation (Boursorama Banque, Hello bank et BforBank.)

>> Lire également : notre article crédit banque en ligne

Les banques en ligne ne cessent d’étoffer leur catalogue produit. Alors que, il n’y a pas si longtemps, aucune ne s’était encore jetée dans le grand bain du crédit, elles sont désormais cinq à le proposer. Certes, les montants et les durées du prêt ne sont pas encore aussi souples que ceux des banques classiques, mais cette évolution est loin d’être anodine. Les banques en ligne veulent jouer dans la cour des grands, et pas seulement se contenter du bac à sable.

Constat en chiffres : les clients des banques traditionnelles insatisfaits

Pour évaluer la situation de manière un peu plus claire, il faut jeter un coup d’œil du côté des chiffres.

  • Nombre de clients dans les banques en ligne : 3 millions
  • Nombre de clients des banques traditionnelles : un peu plus de 130 millions
  • De plus en plus de clients quittent leur banque : le taux d’attrition (de perte de clientèle) est évalué à 4,3% selon une étude du cabinet Bain, relayée par La Tribune, un chiffre qui a presque triplé en trois ans. Les banques en ligne sont en général les grandes gagnantes de ce revirement.

Pour le moment, le nombre de clients des banques en ligne reste très inférieur à celui des banques traditionnelles. Celles-ci ne sont donc pas en danger immédiat. Pour autant, mieux vaut pour elles qu’elles ne se reposent pas sur leurs lauriers, comme le prouve le taux d’attrition.

En effet, changer de banque est devenu plus facile depuis l’entrée en vigueur de la loi Macron d’aide à la mobilité bancaire. Celle-ci stipule que la banque d’arrivée et la banque de départ doivent s’occuper des démarches administratives de changement de RIB pour le client, auprès des différents organismes (assurance maladie, EDF…).

La première raison qu’invoquent les clients ayant changé de banque est l’insatisfaction vis-à-vis de la qualité de service. C’est la raison qu’invoque 36% des sondés du cabinet Bain. 33% mettent en cause le prix et 28% la relation avec leur conseiller bancaire.

En revanche, d’autres études mettent en avant la satisfaction client de ceux qui ont opté pour une banque en ligne, comme le commente le Figaro. 88% seraient satisfaits de leur établissement bancaire (voir aussi notre article avis banque en ligne).

Les raisons pour lesquelles les banques en ligne peuvent concurrencer les banques classiques

Les tarifs

Certes, les clients des banques en ligne sont pour le moment minoritaires, mais force est de constater que les banques traditionnelles ne font rien pour les retenir. À l’inverse, elles opposent à la gratuité des banques en ligne des tarifs toujours en augmentation, comme l’a encore prouvé la hausse des tarifs bancaires 2017. Le moindre service devient payant, et les clients ne s’y retrouvent pas toujours. C’est par exemple le cas des frais de tenue de compte : que facturent-ils, exactement ? La « gestion du compte », répondront les banques, ce qui manque cruellement de clarté…

Contact BNP ParibasL’innovation et la qualité du service

De plus, les banques traditionnelles sont très conservatrices. Elles ont beau racheter des start-up ou investir dans certaines d’entre elles, leurs services en eux-même ont du mal à innover. Les espaces clients et les applications smartphone manquent de fonctionnalités. Et, surtout, les moyens de contact sont trop limités. Difficile d’avoir son banquier en téléphone en dehors des heures de bureau traditionnelles, 9h – 12h, 14h – 17h.

De leur côté, les banques en ligne peuvent être joignables jusqu’à 20h, 21h voire 22h chez certaines d’entre elles (voir horaires de contact des banques en ligne).

La souplesse et l’autonomie

Les clients des banques en ligne ne disposent pas de conseiller bancaire dédié. Chaque fois qu’ils contactent leur banque, ils auront sans doute une personne différente au téléphone. À cet inconvénient (qui n’en est pas un pour tout le monde) se substitue la souplesse et l’autonomie. Puisque le client peut effectuer n’importe quelle opération via son espace client il est tout à fait indépendant de sa banque, et peut ne jamais avoir besoin de la contacter s’il n’en ressent pas le besoin.

Inconvénient : l’absence d’agences bancaires

L’inconvénient majeur des banques en ligne est cependant l’absence d’agences bancaires. Impossible d’aller déposer un chèque, du liquide, ou de retirer un chèque de banque à l’accueil, sauf chez Hello bank et Monabanq. En effet, les clients de ces dernières peuvent respectivement se rendre en agence BNP Paribas ou du CIC, banques à qui elles appartiennent ou sont en partenariat.

Tout doit donc s’effectuer par courrier, ce qui, parfois, peut complexifier la relation banque / client, notamment lorsqu’une lettre se perd.

Banques en ligne et banques traditionnelles : un futur à deux, pourquoi pas ?banque en ligne et banque traditionnelle

Le marché est donc complexe, et de nombreux paramètres doivent être pris en compte pour déterminer si les banques en ligne peuvent effectivement concurrencer durablement les banques classiques. Toutefois, la réponse de Capitaine Banque est OUI. Les banques en ligne ont su prouver leur fiabilité, leur sécurité et leur pérennité, et il y a fort à parier que les Français seront, dans les mois et les années à venir, de plus en plus nombreux à opter pour elles (voir aussi : la sécurité des banques en ligne).

Cela augure-t-il pour autant la disparition des agences bancaires et des banques traditionnelles comme nous les connaissons aujourd’hui ? Pas forcément. En revanche, on peut imaginer un processus d’homogénéisation. Les banques en ligne commencent en effet à proposer des offres payantes sans conditions de revenus, comme Boursorama Banque avec son offre Welcome Boursorama à 1,50€ par mois, et ING Direct, même si l’arrivée d’Orange Bank et sa gratuité sans conditions pourraient les pousser à reconsidérer ces formules. Il faudrait cependant, de leur côté, que les banques classiques fassent quelques efforts… ce qui est encore loin d’être le cas.

>> Lire également : comment choisir sa banque en ligne ?

Rédigé par Claire Krust - Mis à jour le 26/10/2023

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